Avec quel langage vous parlez-vous ?

La semaine dernière je vous parlais des mots que vous utilisez pour vous décrire physiquement, lors de nos rendez-vous. Je vous racontais comme ils sont rudes, critiques, négatifs. Aujourd’hui, je vous emmène un peu plus loin dans l’analyse du langage que vous utilisez. Tout le reste du temps. Et vous allez voir, c’est très étonnant.

Commençons par regarder ce qui se passe quand vous interagissez avec les autres.

Sur votre lieu de travail, d’une manière évidente, vous faites attention à la façon dont vous vous comportez. Aux idées que vous avancez. A la façon dont vous les formulez. Vos mots sont pesés, sous-pesés, analysés. Passés au crible des bonnes manières. Du « j’aimerais bien dire ça mais ça n’est pas politiquement correct ».

Tout ce travail de tri dans vos idées, vos pensées, votre communication, vous trouvez que c’est important. Et nécessaire. C’est important pour vos bonnes relations avec vos collègues. C’est important pour votre bilan RH de fin d’année. C’est nécessaire pour votre avancement de carrière.

De même, dans votre cercle amical, vous choisissez vos mots avec soin. Surtout si vous souhaitez avoir avec vos amis, une vraie conversation. Ou si vous avez quelque chose de difficile à leur dire. Dans ces cas-là, vous allez penser et repenser à la situation des dizaines de fois. La jouer dans votre tête. Peut-être même la répétez-vous à haute voix avant d’oser vous lancer.

Vous pesez vos mots. Vous faites cet effort qui vous semble normal, car vous ne souhaitez surtout pas blesser vos amis. C’est un processus souvent long. Parfois fastidieux. C’est un peu comme au travail. Vous y consacrez du temps et de l’énergie. C’est important pour votre amitié. C’est nécessaire pour qu’elle dure.

Dans votre cadre familial, avec vos enfants ou votre conjoint… Les choses commencent à changer.

Comme vous êtes très souvent dans des situations d’interaction avec eux, vous prenez un peu moins le temps de réfléchir. Vous êtes un tout petit peu plus « nature ». « Sans fard ». Vous vous autorisez des petites phrases courtes, dites un peu vite, sans même y penser. Vos mots deviennent un peu plus vifs. Incisifs. Cassants. L’air de rien.

Ce peut-être avec des « Non mais t’es bête ou tu le fais exprès ? » de certaines mamans à leurs enfants, entendus à la sortie de l’école ou au square.

Ou des « Je ne trouve plus mon agenda/ mon téléphone/ ma clé de voiture, où est-ce que TU l’as rangé(e) ? » accusateurs, que vous pouvez servir à votre conjoint, alors que vous avez tout bonnement oublié que vous l’aviez rangé dans un endroit improbable.

Ça vous rappelle des souvenirs ? Oui forcément, parce-que nous en disons tous de ces petites phrases pas très réfléchies. Elle font partie de notre vie courante. Comme si l’intimité que nous partageons avec nos proches nous autorisait à être un peu moins précautionneux dans nos façons de faire, de dire, d’être.

Sur le papier, admettez que vous diriez plutôt que vos relations à vos enfants et votre conjoint sont plus importantes pour vous que celle que vous entretenez avec vos collègues. Et qu’il est plus nécessaire aussi de vivre en bonne harmonie avec eux.

Mon constat est que que plus on se rapproche du cercle d’intimité, plus le langage devient dur, et parfois même cruel. Et c’est à vous que vous réservez le pire. Le meilleur du pire.

Faites une pause. Pendant deux minutes. Ecoutez les mots que vous utilisez pour vous parler quand vous avez commis une erreur. Oublié un rendez-vous. Pris la mauvaise route sur un itinéraire que vous êtes censée connaître sur le bout des doigts. Oublié de freiner plus fort que la voiture de devant et que vous venez de l’enquiller.

Vous constatez comme ça fuse ?

Les « Débile ! Trop c*n(ne). Halllllucinant ! A quoi tu pensais ? Non, mais franchement, t’es nul(le) ! » vous viennent à l’esprit.

Les mots durs et parfois insultants viennent chez vous et pour vous, comme un flot incessant. Il n’y a entre eux et vous, aucun filtre. Aucun temps de réflexion. Aucun travail. Aucune énergie passée à choisir vos mots. C’est un peu comme le bouquet final d’un feu d’artifice. Ça explose de toutes parts, de plus en plus vite. De plus en plus fort.

 Comme s’il n’était pas important que vous entreteniez votre relation avec vous-mêmes. Comme si ça n’était pas nécessaire.

Personnellement, j’ai été championne du langage négatif auto subit. Entre 32 et 35 ans, j’avais 2 enfants en bas âge, un boulot que je trouvais absurde et j’étais fatiguée en permanence.

Le matin à l’heure du réveil, j’étais déjà épuisée par une suite de nuits entrecoupées de crise de toux asthmatiforme, de pleurs liés à des otites ou simplement par des cauchemars d’enfants. Sortir de mon lit était un calvaire. Le simple fait d’ouvrir les paupières était un calvaire.

A cette époque, j’avais coutume de dire qu’il me fallait 3 bulldozers pour me sortir de mon lit le matin. Et je le pensais réellement.

Mon langage intérieur, dans ce moment de flottement de la journée était cru.

Tout cela, à cette époque-là, me semblait normal. Et je me pensais effectivement énorme, à ne pas pouvoir mettre un pied par terre le matin. Réellement idiote, d’avoir oublié un rendez-vous dans un agenda beaucoup trop chargé. Ou franchement débile, quand j’en venais à être simplement maladroite.

Tout était prétexte à ce genre de discours dévalorisant. Du plus petit oubli à l’erreur grave.

Cette façon de me parler intérieurement, me donnait-elle envie de mettre un pied par terre le matin ? Avancer au cours de la journée ? Me mettre en avant au boulot ? Me risquer à sortir des sentiers battus pour proposer quelque chose de neuf au risque de me planter ?

Evidemment non. Je n’avais plus d’énergie pour cela. Je faisais déjà tant d’efforts pour juste survivre.

Et j’ai croisé la route de la Communication Non-Violente.

Que ce soit dans les écrits de Marshall Rosenberg (« Les mots sont des fenêtres (ou bien ce sont des murs) ») ou ceux de Thomas d’Ansembourg (« Cessez d’être gentil, soyez vrais »), leur discours est largement tourné vers notre communication avec les autres. L’expression de nos émotions, pensées, aux autres.

Mais après tout, ce que nous savons faire pour les autres, je crois qu’il est vital que nous sachions commencer par le faire pour nous mêmes.

L’attention. L’écoute. La bienveillance.

En résumé… Quand vous parlez à des inconnus, vous êtes hyper polie. Quand vous vous adressez à vos collègues, vous faites le tri dans vos idées dans vos pensées et vos paroles, parce que c’est nécessaire et important.

Quand il s’agit de vos amis aussi.

Quand ce sont vos enfants et votre conjoint, ça commence à déraper.

Quand vous vous parlez à vous… ça dévie franchement.

Modifiez votre langage intérieur et ressentez comme votre énergie nouvelle vous permet d’être en lien plus fort, plus vrai, plus juste avec vous et avec les autres!

« Notre unique obligation morale est de défricher en nous les vastes clairières de la paix et les étendre de proche en proche jusqu’à ce que la paix irradie vers les autres. » Etty Hillesum

Vous voyez comme ça ne prend pas grand chose de changer le monde? Et à l’heure actuelle, ça me semble absolument vital.

Vous m’accompagnez?

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Article publié pour la 1e fois le 27.04.2017

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